Pavillon bleu
Le Pavillon bleu est un label environnemental et touristique international décerné annuellement depuis 1985. En 2010, 79 % des Français attestent faire usage de la mer dans le cadre d’activités balnéaires – plage, baignade –, selon une enquête menée par l’IFOP pour l’Agence des aires marines protégées (enquête réalisée du 19 au 21 mai 2010 sur un échantillon de 1050 personnes, représentatif de la population française âgée de 15 ans et plus).
Un label organisé dans un cadre réglementaire européen à l’origine
Dans l’immédiat après-guerre, l’activité balnéaire reste largement appuyée sur une vision utilitariste de la nature. La propreté de la plage devient un impératif de sécurité publique en Occident à partir de la fin des années 1960. En 1970, l’association « Que Choisir ? » alerte l’opinion publique sur l’état catastrophique des multiples pollutions des plages en publiant les résultats tenus secrets des relevés pratiqués sur le littoral français. Le ministère de la Santé réalise en 1974 une classification des plages d’après leur pollution. L’édition du journal Le Point y donne une grande publicité, pointant notamment les sept plages ayant une pollution bactérienne inacceptable (Vincent, 2024).
La directive européenne n°76/160/CEE du 8 décembre 1975 du Conseil de la Communauté économique européenne (CEE, ancien nom de l’Union Européenne) oblige les États membres de l’Union Européenne à contrôler la qualité des eaux de baignade selon des règles précises, à s’assurer que les eaux respectent les niveaux de qualité définis et à transmettre chaque année les résultats de ce contrôle à la Commission européenne. Cette directive a été abrogée en 2006 par la directive 2006/7/CE du Parlement européen, qui renforce et modernise la gestion de la qualité des eaux de baignade. Les évolutions apportées concernent les paramètres d’information du public, de surveillance, de classement et de gestion de la qualité sanitaire des eaux de baignade. Des informations sont également données sur les sources de contamination des eaux, permettant ainsi de focaliser l’attention sur les actions pouvant mener in fine à une amélioration de leur qualité.
Un symbole d’une qualité environnementale des plages lauréates
Bien que précoce (création en 1985), le label « Pavillon Bleu » fait partie de cette phase de démarche « Qualité » qui s’empare du secteur touristique à la fin du 20e siècle. Il constitue un indicateur possible de l’offre de plage où la fréquentation est susceptible d’être relativement élevée (Ill. 1).

Ill. 1. Panneau d’information du Pavillon bleu (cl. Florent Rey, coll. Wikipedia)
Si le souci de rentabilité économique est toujours présent, il doit désormais se faire selon d’autres modalités et l’approche qualitative est désormais privilégiée. Le tourisme durable promeut, selon l’ODIT (aujourd’hui fusionné pour devenir l’agence nationale de développement Atout France), le guidage des projets touristiques par certaines valeurs fondamentales, dans le domaine économique (meilleure répartition des revenus, par exemple) ou dans le domaine environnemental (Bonnet, 2011). Les données sur les concessions de plage et les autorisations d’occupation temporaire sur le domaine public maritime permettent d’élargir le champ de l’analyse à l’ensemble des plages exploitées.
Le Pavillon Bleu, créé en 1985 en France, est étendu en 1987 à l’ensemble des pays membres de l’Union européenne (Ill. 2). Aujourd’hui, le Pavillon Bleu est une opération menée dans vingt-cinq pays européens et reprise depuis 2001 en Uruguay, au Maroc et en Afrique du Sud.

Ill. 2. Drapeau du Pavillon Bleu sur Plava zastava, Croatie (cl. Roberta F., coll. Wikipedia)
Au début, seuls deux critères étaient retenus : la qualité de l’eau de baignade et l’assainissement. Depuis, ces critères ont été élargis. Il y en a maintenant une soixantaine : l’environnement général ; la gestion de l’eau ; l’éducation et la sensibilisation du public à l’environnement (Merasli, 2004). Le Pavillon Bleu valorise chaque année les communes et les ports de plaisance qui mènent de façon permanente une politique de développement touristique durable. Une plage Pavillon Bleu dispose d’un certain nombre d’équipements permettant de minimiser les impacts de la fréquentation touristique (poubelles de tri et sanitaires), tient compte de la sécurité et l’accessibilité à la baignade, de la mise à disposition d’informations sur la qualité de l’eau de baignade et sur la faune et la flore locales. Toutefois, en examinant les critères de la labélisation Pavillon Bleu, Ariza et al. (2010) remarquent que les attributs biologiques tendent à être progressivement pris en considération au détriment des attributs géomorphologiques et paysagistes ainsi que des aménagements des plages. Des plages peuvent perdre leur pavillon bleu à cause de la (mauvaise) qualité qu’elles offrent (Taibi, 2014).
Un label connu et reconnu
En 2016, un sondage de l’institut BVA montre que 67 % des Français connaissent le Pavillon Bleu et qu’il pourrait inciter 81 % des Français dans leur choix de lieu de vacances. Selon 8 Français sur 10, le Pavillon Bleu est une garantie de propreté des plages et de la qualité des eaux (Sondage BVA pour le Pavillon Bleu, réalisé par Internet du 22 au 23 août 2016).
Toutes les régions françaises sont concernées par la présence du label Pavillon Bleu en 2024 (Ill. 4). En 2024, 398 plages et 106 ports de plaisance ont fait flotter le drapeau Pavillon Bleu en récompense de leur engagement environnemental (en ligne, https://www.service-public.fr/particuliers/actualites/A14923). Mais la répartition n’est pas homogène géographiquement. En 2010, le nombre de plages Pavillon bleu pour la sous-région marine Méditerranée occidentale sont de 170, ce qui constitue près de 60 % du nombre total de plages labellisées des départements littoraux de France métropolitaine. Les Côtes-d’Armor, la Somme et le Pas-de-Calais sont également caractérisés par un nombre conséquent de plages labellisées, mais généralement non exploitées. Les plages des départements des Bouches-du-Rhône, du Gard, de l’Aude et des Pyrénées-Orientales sont quant à elles généralement peu exploitées et peu labellisées.

Ill. 3. Carte des sites Pavillon Bleu en 2024 en France (coll. Pavillon Bleu, https://pavillonbleu.org/actus/entree/decouvrez-le-palmares-pavillon-bleu-2024.html)
Aucune étude scientifique ne paraît avoir cherché les raisons de cette répartition inégale sur le territoire français. L’usage touristique des plages et des ports est sans doute à l’origine de ce besoin de déterminer la qualité des éléments naturels. En 2019, quasiment la moitié des dépenses touristiques et de la valeur ajouté sur les littoraux français sont réalisées sur la côte méditerranéenne, et pour moitié en Provence-Alpes-Côte d’Azur (Le Gentil et al., 2023).
Il existe des opérations comparables au label Pavillon Bleu : au Royaume-Uni, le Seaside Award Beaches, selon des critères plus simples pour des plages « rurales » (les critères du Pavillon Bleu sont parfois perçus comme des attentes des plages urbaines), et, en Espagne, le Système de qualité touristique, depuis 2003. En parallèle, depuis 1999 (marque déposée à l’INPI), une initiative purement privée de la Surfrider Foundation propose le label Pavillon Noir pour stigmatiser les communes où des causes d’affections chez les surfeurs sont constatées. La proclamation de la liste des Pavillons Noirs, presque concomitante de celle du Pavillon Bleu, fait l’objet de nombreux articles de protestation de la part des élus (Sauzey et al., 2002).
Bibliographie
- Ariza Edouard, Jimenez José A., Sarda Rafael, et al. (2010) « Proposal for an integral quality index for urban and urbanized beaches », Environmental Management, vol. 45, n° 5, p. 998-1013, www.doi.org/10.1007/s00267-010-9472-8.
- Bonnet Anne-Sophie, 2011, « Tourisme, “Qualité” et développement durable. Les exemples des îles de Ré et de Noirmoutier », Cahiers nantais, n°2, p. 55-64, en ligne https://cahiers-nantais.fr/docannexe/file/898/bonnet.pdf [pdf].
- Guingand Aurélien, 2012, Analyse économique et sociale de l’utilisation de nos eaux marines et du coût de la dégradation du milieu marin. Méditerranée occidentale, IFREMER, https://archimer.ifremer.fr/doc/00332/44270/43839.pdf [pdf]
- Le Gentil Eric, Alban Frédérique, Leprince Matthieu et Mansanti Fabien, 2023, Tourisme littoral. Façade Méditerranée, Rapport du Ministère du Développement durable, mai, https://www.geolittoral.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/tourisme_vf_med_amure.pdf [pdf].
- Merasli Saida, 2004, « La qualité dans l’industrie du tourisme : un impératif majeur pour un tourisme durable », Téoros, vol. 23, n°2, https://journals.openedition.org/teoros/634#tocto2n8.
- Sauzey Philippe, Leger Anne-Marie, Ruiz Gérard, Ribière Georges et Wauters Alain, 2002, Rapport sur les campagnes de labellisation des eaux de baignade, des plages et des ports de plaisance, Rapport ministériel français, décembre, https://bel.uqtr.ca/id/eprint/723/1/6-19-1924-20070220-1.pdf [pdf].
- Taibi Nasr-Eddine, 2014, « Impacts du tourisme de masse sur les plages. Expérience de l’Espagne (Méditerranée) », Marine Sciences and Coastal research, p. 39-55.
- Vincent Johan, 2024, « De l’impossible bronzage à l’impossible plage dynamique ? Influence des corps balnéaires sur l’environnement des plages (fin XIXe siècle-début XXIe siècle) », dans Joanne Clavel, Alix Levain et Florence Revelin (dir.), Des vies avec des plages : Expériences, relations, devenirs, Rennes, PUR.