Jardin remarquable

Le label « Jardin remarquable », créé en 2004 par le ministère de la Culture avec le concours du Conseil national des parcs et jardins (CNPJ), distingue des parcs et des jardins français d’exception, de toutes époques confondues et protégés ou non au titre des Monuments historiques et des sites. Ce label d’État, dont le suivi et la promotion sont assurés par le ministère de la Culture et la Direction générale des Patrimoines et de l’Architecture, distingue les jardins ouverts au public présentant un intérêt culturel, esthétique, historique ou botanique, et dont le but n’est pas essentiellement commercial, pour une période de 5 ans renouvelable.

Historique

Les jardins labellisés doivent non seulement répondre à certains critères d’exigence comme « la qualité de la composition, l’intégration dans le site, les éléments architecturaux ou ornementaux remarquables, l’intérêt historique et/ou botanique, etc. » (Bénetière, 2019), mais aussi assurer l’accueil des publics et l’entretien du site dans le respect de la qualité environnementale des lieux. Le label « Jardin remarquable » tient compte de la diversité des parcs et jardins et peut concerner des jardins petits ou étendus, historiques ou contemporains et de tous les styles, et constitue une véritable opportunité de valorisation de ces sites.

Depuis 2004, plus de 470 jardins remarquables ont été labellisés. Ils sont tous ouverts à la visite, notamment lors de la manifestation annuelle nationale des Rendez-vous aux jardins, créée en 2003.

À l’occasion des 20 ans du label « Jardin remarquable » et suite à la publication de la circulaire du 15 décembre 2023 qui l’actualise, le ministère de la Culture a organisé un colloque sur ce thème le 27 novembre 2024 à l’Institut national du patrimoine à Paris. Réunissant des experts, des représentants de l’État et des propriétaires-gestionnaires de jardin afin d’échanger sur l’histoire, les missions et les évolutions du label Jardin remarquable, ce colloque a permis de présenter un état des lieux précieux des enjeux, des bénéfices mais aussi des limites et des pistes d’amélioration possibles de ce label.

Une diversification du corpus des jardins labellisés

Si les premiers jardins labélisés remarquables étaient essentiellement des jardins de châteaux, ce corpus s’est progressivement enrichi avec l’ajout de jardins plus populaires ou plus confidentiels, mais aussi contemporains, les deux tiers du corpus des jardins labélisés ayant été réalisés aux XXe et XXIe siècles. Par ailleurs, 70% des jardins remarquables sont privés, 35% d’entre eux bénéficient déjà d’une protection au titre du Code du patrimoine et environ 10% d’une protection au titre du Code de l’environnement (Gadenne, 2024). L’octroi de ce label offre par ailleurs une considération et une visibilité certaine à ces sites d’exception qui ne satisferaient pas nécessairement aux critères encore plus stricts et sélectifs des Monuments historiques.

Le dynamisme de ce label se traduit aussi par son internationalisation. Depuis 2022, le label a en effet dépassé les frontières nationales puisqu’il s’est étendu à la Wallonie (Belgique), qui recense une vingtaine de jardins remarquables. D’autre part, l’AAJRE (Association des amis des Jardins remarquables européens), créée en 2021 par la docteure en psychologie et grande figure du mécénat culturel en France d’origine russe Natalia Logvinova Smalto, témoigne, à travers sa programmation évènementielle et sa communication (site internet et réseaux), de l’intérêt suscité par ce label. La Fondation Signature, également créée par Natalia Logvinova Smalto, décerne par ailleurs chaque année depuis sa création en 2019, en collaboration avec le ministère de la Culture, le prix de l’Art du jardin à un Jardin remarquable, traduisant encore une très forte volonté de valoriser ces jardins labellisés et ceux qui les entretiennent. En 2024, c’est le jardin botanique alpin du Lautaret, centre de recherche scientifique de l’Université Grenoble Alpes et du CNRS à Villar-d’Arène dans les Hautes-Alpes, qui a remporté le Prix de l’art du Jardin de la Fondation Signature.

Une procédure spécifique de candidature pour un label exigeant

Le dossier de candidature à une labellisation « Jardin remarquable » comporte un certain nombre de pièces permettant d’appréhender l’état actuel du jardin ainsi que son histoire, mais aussi l’engagement des propriétaires dans leur démarche d’ouverture au public.

Le dossier se compose ainsi des pièces suivantes : « l’identification et les coordonnées à jour du demandeur ; un descriptif accompagné d’un dossier photographique ; un plan de situation et un plan actuel du jardin ou une photographie aérienne ; un plan cadastral ou la liste des parcelles cadastrales ; un historique ; des plans historiques (s’ils existent) ; la liste des éléments remarquables (bassins, cascades, statues, grottes…) ; la liste des végétaux remarquables ; les éléments d’information relatifs au mode de gestion du jardin (moyens humains, organisation, prise en compte de la qualité environnementale) ; un descriptif du mode de gestion du jardin (plan de gestion, gestion écologique certifiée, raisonnée, en régie, externalisée, etc.) ; la liste de la documentation mise à la disposition du public, ainsi que des éventuelles animations à destination des jeunes ; un dossier photographique comportant au moins 8 images en format papier ou numérique ; un engagement écrit d’ouvrir le jardin à la visite au moins 40 jours par an, entre le 1er janvier et le 31 décembre, et au moins 6 heures par jour, en précisant les périodes réelles d’ouverture ainsi que les conditions de visite (y compris sur rendez-vous) ; un engagement écrit de participer aux opérations nationales organisées par le ministère de la Culture dans le domaine des jardins (Rendez-vous aux jardins) et du patrimoine (Journées européennes du patrimoine) » (circulaire du 15 décembre 2023, remplaçant la circulaire du ministre de la culture du 17 février 2004, actualisée par la circulaire du 29 octobre 2008).

Les dossiers sont soumis à la DRAC (Direction Régionale des Affaires Culturelles) du lieu où se situe le jardin. Les demandes de labellisation sont alors examinées par un groupe de travail régional présidé par le préfet de région ou son représentant, qui statue sur l’attribution du label en fonction de la note octroyée au dossier. Le groupe de travail prend ainsi en compte les critères suivants, assortis d’un barème et définis dans la circulaire de 2023 : « Composition ; intégration dans le site et cadre général ; éléments remarquables ; intérêt botanique ; intérêt historique ; communication, pédagogie, documentation, signalétique, support de visite, accessibilité ; entretien dans le respect des bonnes pratiques environnementales et de la biodiversité ; plan de gestion prospective » (circulaire de 2023).

Les groupes de travail régionaux sont constitués des personnes suivantes ou de leur représentant : « le directeur régional des affaires culturelles ; le correspondant jardins ou l’agent chargé des dossiers jardins à la DRAC ; le directeur régional de l’environnement, de l’aménagement et du logement ; le chef du service chargé de l’Inventaire général du patrimoine culturel de la région ou son représentant, et enfin, le chef du service chargé du développement touristique de la région ». Ces groupes comprennent aussi des membres désignés par le préfet de région ou de leur suppléant pour une durée de cinq ans renouvelable : « un architecte des Bâtiments de France en fonctions dans une UDAP (Unité départementale de l’architecture et du patrimoine) de la région ou un architecte urbaniste de l’État en fonction au sein des services de la DRAC ou leur suppléant ; un membre de l’un des conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement de la région ; un membre d’une association de gestionnaires de parcs et jardins publics (HORTIS -Association des responsables d’espaces nature en ville, AITF- Association des Ingénieurs Territoriaux de France – ou autre) dans les régions métropolitaines ; deux membres d’associations régionales consacrées aux parcs et jardins ; quatre personnalités qualifiées dans le domaine des jardins dans les régions métropolitaines, et deux dans les territoires d’outre-mer » (circulaire de 2023).

Ces groupes de travail, qui statuent sur l’attribution et le renouvellement du label jardin remarquable, sont les garants du niveau d’exigence et de la qualité du label. Ils étudient les dossiers de candidature et décident de l’opportunité de visiter les jardins candidats. Ils jouent aussi un rôle de conseil, en formulant des recommandations en vue d’une attribution ultérieure du label.

Si le dossier est retenu, le label est attribué pour une durée de cinq ans. Elle est renouvelable sur demande des propriétaires. Il s’agit toutefois d’un label exigeant, et « près de 13 % des jardins ayant demandé leur reconduction ont finalement perdu leur distinction », notamment à cause d’un défaut d’entretien ou encore du non-respect de l’engagement de leur ouverture au public (Bénetière, 2019). Au cours du colloque tenu à Paris en 2024, différents intervenants indiquent que 80 jardins ont perdu leur label jardin remarquable depuis la création de celui-ci en 2004. Ce nombre, tout comme celui des 470 jardins labellisés au total, est toutefois en constante évolution puisque des jardins acquièrent ou perdent leur label au fil du temps.

Par ailleurs, la loi Labbé de 2014, qui interdit le recours à des produits phytosanitaires dans les parcs et jardins ouverts au public en France, a profondément modifié les pratiques d’entretien de ces espaces, auxquelles sont d’autant plus vigilants les groupes de travail régionaux dans le processus d’attribution et le maintien du label jardin remarquable.

À titre d’exemple, le jardin du château de Talcy (Loir-et-Cher), appartenant à l’État et géré par le Centre des Monuments Nationaux, qui a obtenu le label jardin remarquable dès l’année de sa mise en place en 2004, l’a perdu en 2010 à cause d’un défaut d’entretien et de gestion du jardin, dû notamment à une réduction de l’effectif des jardiniers à ce moment-là. Différents outils sont alors mis en place : un plan de gestion dès 2014, le défrichement des archives (plans, listes de plantes, etc.), de nouvelles formations pour les jardiniers, et conduisent à des actions concrètes et écologiquement vertueuses sur le site (diversification des fleurissements, mise en place d’éco-pâturage, recouvrement de la lisibilité des parterres par la taille régulière des végétaux, etc.) afin de reconquérir le label, ce qui fut chose faite en 2022. (Taulard, 2024).

Illustration de l'entrée Jardin remarquable

Ill.1 : Jardin du château de Canon à Mézidon, label obtenu en 2004.

Les avantages du label Jardin remarquable : un formidable outil de valorisation

Si le label jardin remarquable ne permet plus d’obtenir d’agrément fiscal depuis le 1er janvier 2014 (comme c’est le cas pour les Monuments historiques inscrits ou classés), il procure toutefois de nombreux avantages en termes de communication, contribuant ainsi à la notoriété des jardins concernés et à attirer des visiteurs.

Les jardins labellisés sont en effet mentionnés dans les documents diffusés par le ministère de la Culture. En outre, depuis 2015, le ministère de la Culture a mis en ligne un site internet dédié aux jardins remarquables sur le territoire français métropolitain et ultramarin. Il y propose notamment une carte interactive régulièrement mise à jour, permettant de localiser rapidement les jardins labellisés, accompagnés d’une description succincte et d’informations pratiques utiles à la visite (contacts, site internet, etc.).

Illustration de l'entrée Jardin remarquable

Ill.2 : Exemple du jardin Massey à Tarbes, label obtenu en 2004.

Les propriétaires des Jardins remarquables apposent à l’entrée de leur jardin une plaque émaillée, remise par la DRAC, où figure le logotype du label. Les propriétaires peuvent également obtenir une signalisation routière spécifique portant l’idéogramme ID16e, défini par l’arrêté du 24 novembre 1967 modifié relatif à la signalisation des routes et des autoroutes.

Illustration de l'entrée Jardin remarquable

Ill.3 : Logotype et idéogramme routier du label, de gauche à droite : le logotype apparaissant sur une plaque émaillée à l’entrée de chaque Jardin remarquable; l’idéogramme routier ID16e symbolisant les parcs ou jardins ayant reçu le label d’État « Jardin remarquable ».

Outre les outils promotionnels déjà cités, les publications concernant les jardins remarquables constituent une opportunité de visibilité exceptionnelle, notamment pour les jardins privés, plus confidentiels, qui apparaissent alors aux côtés de domaines d’exception comme par exemple Versailles ou Fontainebleau. Depuis 2020, les Éditions du patrimoine publient ainsi la collection des Guides des jardins remarquables, qui se décline par régions, et dont le premier paru est celui sur l’Île-de-France.

Illustration de l'entrée jardin remarquable

Ill.4 : Trois exemplaires de la collection des Guides des jardins remarquables, publiés aux Éditions du patrimoine depuis 2020, format 13 x 22,5 cm, broché à rabats.

En 2024, à l’occasion des vingt ans du label, les Éditions du patrimoine publient au format beau livre l’ouvrage Jardins remarquables, écrit par Cécile Niesseron. Ce livre propose une sélection de 32 Jardins remarquables traduisant la diversité des typologies de ce corpus sur le territoire métropolitain et ultramarin, ainsi qu’en Belgique.

Illustration de l'entrée Jardin remarquable

Ill. 5 : Le livre Jardins remarquables, paru aux Éditions du patrimoine en novembre 2024.

Une opportunité touristique ?

Depuis les années 2000, un véritable engouement autour du jardin comme « objet touristique » ne cesse de croître, en témoigne la parution d’ouvrages consacrés à ce sujet (Racine, Blandigneres, 2002 ; Origet du Cluzeau, 2011) mais aussi la fréquentation croissante des jardins et des manifestations les mettant à l’honneur, comme le célèbre festival international des jardins de  Chaumont-sur-Loire, créé en 1992, qui a connu une augmentation de fréquentation de 84 % entre 2005 et 2012. En 2022, le Domaine de  Chaumont-sur-Loire a comptabilisé 535 875 entrées pour le festival des Jardins et le Château (source : Tourisme en Loir-et-Cher : Bilan 2022 et perspectives 2023, dossier de presse du conseil départemental de Loir-et-Cher).

Les collectivités territoriales se saisissent alors de cette opportunité en inscrivant les jardins dans une véritable stratégie de développement touristique. C’est ainsi que l’Essonne, un territoire en périphérie de Paris et « en déficit d’image touristique », a fortement misé sur son patrimoine de jardins, qui compte notamment les célèbres domaines de Chamarande, Méréville, Montauger, Courances, mais encore, entre autres, les jardins remarquables de Courson et Saint-Jean de Beauregard, qui accueillent la fête des Plantes, afin de créer une identité touristique forte autour de ces lieux spécifiques. Dès 2003, l’évènement « Secrets de jardins en Essonne » est créé, ouvrant au public les portes de très nombreux jardins (publics comme privés) et créant une dynamique touristique particulière (Salaün, « Le label Jardin remarquable : deux décennies d’excellence », 2024 ; Salaün, 2023).

Finalement, la mise en place du label « Jardin remarquable » répond au souhait de faire connaître et de valoriser la très grande diversité des parcs et jardins (petits ou étendus, historiques ou contemporains et de tous les styles) ouverts au public et particulièrement bien entretenus sur le territoire. Le nombre important de jardins labellisés en France (470 en 2024) atteste du vif intérêt suscité par ce patrimoine culturel vivant en particulier.

Si le label Jardin remarquable est un outil de valorisation extrêmement intéressant, il ne constitue pas toutefois, une réelle mesure de sauvegarde de ce patrimoine, au contraire d’une protection dans le cadre du code du patrimoine (classement au titre des Monuments historique, site patrimonial remarquable) ou du code de l’environnement, mais encore des plans locaux d’urbanisme (PLU).

D’autres labels existent et récompensent notamment la gestion écologique et responsable des parcs, jardins et espaces verts considérés comme les labels « Eco jardin », « Terre saine », « villes et villages fleuris » ou encore « Eve – Espaces végétaux écologique » (Coffin, 2016). Ces autres labels se focalisent toutefois sur le volet environnemental des espaces labellisés tandis que celui des Jardins remarquables, qui le prend aussi en compte, d’autant plus depuis la circulaire de 2023, s’attache également à des critères d’ordre culturel, esthétique, historique ou botanique.

Marie HÉRAULT

Bibliographie

  • Bénetière Marie-Hélène, 2019, « Le label “Jardin remarquable” en Occitanie », dans Patrimoines du Sud [En ligne], n° 9, mis en ligne le 1er mars 2019, consulté le 1er mai 2019. URL : http://journals.openedition.org/pds/692 ; DOI : 10.4000/pds.692
  • Coffin Jean-François, « Le label Jardin remarquable : Une distinction de qualité » dans Jardins de France, n°667, hiver 2022.
  • Coffin Jean-François, « Des labels qui distinguent les bonnes pratiques », dans Jardins de France, n°642, Juillet-août 2016, p.36-38.
  • Gadenne Virginie, « Regards croisés sur les jardins remarquables : programme d’étude sur les 20 ans d’un label », intervention dans le colloque « Le label Jardin remarquable : deux décennies d’excellence », 27 novembre 2024, Institut national du patrimoine, Paris.
  • Niesseron Cécile, Jardins remarquables, Éditions du patrimoine, 280 p.
  • Origet du Cluzeau Claude, Vendre le tourisme de jardins, Economica, 2011.
  • Racine Michel, Blandigneres Marguerite, Le tourisme de jardins en France, Afit, 2002.
  • Salaün Rémi, « Le label Jardin remarquable, un atout pour la mise en tourisme des jardins ? », intervention dans le colloque « Le label Jardin remarquable : deux décennies d’excellence », 27 novembre 2024, Institut national du patrimoine, Paris.
  • Salaün Rémi, « Essonne : enjeux d’un tourisme nature de proximité », dans Espaces, janvier 2023.
  • Taulard Julien, « La reconquête du label Jardin remarquable », intervention dans le colloque « Le label Jardin remarquable : deux décennies d’excellence », 27 novembre 2024, Institut national du patrimoine, Paris.
  • Tourisme en Loir-et-Cher : Bilan 2022 et perspectives 2023, dossier de presse du Conseil départemental de Loir-et-Cher, avril 2023, source : https://www.departement41.fr/fileadmin/user_upload/Dossier_presse_VD.pdf

Sites internet

Ressources