AAT Téoros d'octobre 2024

Appel à textes « En contexte de tensions et de critiques, comprendre la résistance du tourisme aux changements »

Catégorie : À la une, Appels à contribution des partenaires

La revue Téoros lance un nouvel appel à textes pour une publication à paraître en 2027. Le thème abordé s’intitule « En contexte de tensions et de critiques, comprendre la résistance du tourisme aux changements ». Seront étudiés des textes résultant de recherches empiriques, ainsi que des réflexions théoriques et/ou méthodologiques liés aux questionnements, ou qui présentent d’autres perspectives sur le passé, le présent et l’avenir du tourisme social, que ce soit du point de vue de l’offre touristique (les acteur·rices du tourisme social), de la demande, ou encore des travailleur·euses du secteur, des politiques publiques ou des populations résidant dans des destinations touristiques où de telles pratiques se manifestent.

Contexte

Les études en tourisme aiment souvent rappeler la croissance fulgurante du phénomène, quantifié par ONU Tourisme – anciennement l’Organisation mondiale du tourisme (OMT) – depuis les années 1950. Outre quelques épisodes de décroissance généralisée à l’échelle planétaire (crise du risque terroriste dans le sillon des attentats du 11 septembre 2001 et crise sanitaire 2020-2023), la croissance du tourisme n’a été altérée que sporadiquement en fonction de risques localisés de type social, économique, technologique ou d’origines naturelles. Ainsi, la croissance à la fois du nombre de touristes et de voyages ne se dément pas.

En 2019, l’OMT estimait à 1,5 milliard le nombre d’arrivées de touristes internationaux – la dixième année consécutive de croissance. À travers le monde, plusieurs commentateurs décriaient les abus du tourisme de masse et, de manière plus particulière, le phénomène du surtourisme (Ballester, 2018 ; Tang et al., 2023 ; Gay, 2024).

La chute historique du nombre de voyages entre 2020 et 2022 liée à l’épisode de pandémie mondiale de COVID‑19 marque l’imaginaire, tant sur le plan des pertes d’emplois – catastrophiques – et des crises humaines qui en résultent, que sur les bénéfices environnementaux. L’arrêt de l’économie mondiale – et du tourisme, en première ligne – durant cette pandémie nourrit les appels à une révision complète du modèle d’exploitation du voyage, de la mise en tourisme aux modes de gestion des lieux prisés, dès la reprise (Romagnoli et Charron, 2020 ; Clergeau, 2021 ; Kadri et al., 2023 ; Tasnim et al., 2023).

Depuis déjà une trentaine d’années, les critiques – y compris des universitaires – sont nombreuses à suggérer, voire demander des changements fondamentaux à la fois dans la façon de voyager – bons et mauvais tourismes (voir le vocabulaire de Kadri et al., 2022), la manière de gérer les flux de visiteurs et les conséquences sur l’occupation de l’espace (Berlingué et Contet, 2017 ; Tosseri, 2020 ; De Bueil-Baudot, 2022 ; Genç et al., 2022). On déplore aussi la lente transition de l’offre touristique vers un tourisme plus durable et équitable (Pickel-Chevalier et Knafou, 2011 ; Mandić et Petrić, 2021 ; Kostynets et Kostynets, 2023). En effet, même si les professionnels et les différents acteurs du tourisme observent de multiples actions exemplaires en matière de transition sociale et écologique, l’exemplarité peine à devenir la norme pour diverses raisons (Gössling et Reinhold, 2024).

Au lieu de cela, le tourisme reprend en sortie de crise comme si rien, ou presque, ne s’était passé. Ainsi, dès 2023, le tourisme représentait plus de 1300 millions de voyageurs à travers le monde, ayant rattrapé à 88 % les chiffres de 2019 (ONU Tourisme, 2024). Loin de s’adapter, le touriste est plus présent et exigeant que jamais. Selon ONU Tourisme (2024), l’année 2024 annonce un record mondial. Tandis que les touristes semblent faire la sourde oreille aux appels à la modération en pleine crise climatique, les voyages et les destinations s’additionnent. L’écoanxiété et la culpabilité environnementale ne sont pas de tous les voyages : selon plusieurs, elles s’évaporent au moment des vacances (Durif et al., 2017 ; Higgins-Desbiolles et al., 2019 ; Mucha, 2020 ; Wachyuni et Kusumaningrum, 2020).

Depuis plusieurs années, plusieurs efforts ont été déployés par les gouvernements pour protéger et organiser l’accueil des touristes dans les espaces sensibles, tels que les forêts et les lieux patrimoniaux, à travers des structures de protection (ex : Société des établissements de plein air du Québec, au Québec, Fédération des Parcs naturels régionaux, en France). En parallèle, maintes propositions ont été créées pour adapter les formes classiques du tourisme : écotourisme, tourisme communautaire, tourisme social, tourisme lent, tourisme régénératif. Or, malgré de bonnes intentions initiales, ces formes alternatives de tourisme semblent reproduire le plus souvent les mêmes effets nocifs que le tourisme traditionnel, mais de manière plus subtile (Laliberté, 2005 ; Higgins-Desbiolles et al., 2019).

Force est ainsi de constater que malgré des alertes mondiales, le développement de connaissances sur les pistes d’amélioration du secteur et la montée en compétence globale de l’industrie, le tourisme résiste à un changement réel et en profondeur de ses modèles (Shah et al., 2022 ; Bishop et al., 2023). Ainsi, pour mieux comprendre ce qui empêche le tourisme de prendre les virages nécessaires à sa pérennité, nous interrogeons la place du tourisme dans la société aujourd’hui, ses transformations et mutations nécessaires, ainsi que la capacité de résilience des territoires et des acteurs. L’objectif de ce dossier de Téoros est d’identifier les obstacles à surmonter et les leviers à activer pour une réelle transition du monde du tourisme vers des pratiques plus durables (valorisation et respect des cultures et des environnements), tant du point de vue de la mise en tourisme et de l’offre que des pratiques touristiques et de la demande.

Trois axes de recherche sont ainsi proposés :

  • l’identification des barrières à l’évolution du tourisme dans la société (socioculturelles, comportementales, réglementaires et législatives, économiques, géographiques, climatiques, etc.) ;
  • la compréhension des faiblesses ou des failles des nouveaux modèles proposés (tourismes durable, responsable, lent, solidaire, communautaire, social, éthique, écologique et accessible aux personnes en situation de handicap) ;
  • la recension et l’analyse des cas d’innovation exemplaires en matière de gestion et de pratiques touristiques durables (respect de l’environnement, des sociétés et des cultures) pour identifier les leviers d’action et de mobilisation des acteurs.

Coordination du numéro

  • Maryse BOIVIN, professeure en tourisme, Département d’études urbaines et touristiques, École des sciences de la gestion, Université du Québec à Montréal (ESG UQÀM)
  •  Alain A. GRENIER, professeur en tourisme, Département d’études urbaines et touristiques, École des sciences de la gestion, Université du Québec à Montréal (ESG UQÀM)
  • M. Reda KHOMSI, professeur en tourisme, Département d’études urbaines et touristiques, École des sciences de la gestion, Université du Québec à Montréal (ESG UQÀM)
  •  Boualem KADRI, professeur en tourisme, Département d’études urbaines et touristiques, École des sciences de la gestion, Université du Québec à Montréal (ESG UQÀM)
  •  Jérôme PIRIOU, maître de conférences, ESTHUA, Institut national de tourisme INNTO France, Université d’Angers
  • Luc BEAL, professeur-chercheur, Excelia Business School

Calendrier

La date de soumission des textes est fixée au 2 novembre 2025.

Modalités de soumission

Les propositions d’articles doivent être soumises sur la plateforme OJS de la revue Téoros :https://edition.uqam.ca/teoros