Appel à texte Revue Partances n°4

Catégorie : Non classifié(e)

Les vacances « représentent le temps vraiment vivant, vraiment vécu, par rapport au temps sclérosé et exsangue de l’année de travail » écrivait Edgar Morin au siècle dernier (E. Morin, 1962, p. 81). Cette opposition apparait toujours d’actualité, faisant des vacances une quasi-obligation de changement d’avec la vie ordinaire. Dans les représentations collectives, l’idée de rupture est en effet étroitement associée à l’idée de départ (P. Périer, 2000), et elle construit de ce fait l’expérience des partants et des sédentaires : on part en vacances, c’est à dire dans un Ailleurs (parfois proche) mais où l’on peut être autre et autrement. Cette rupture, inégalement accessible, prend des formes variables (de la rupture ritualisée au défi de l’aventure), mais elle est posée comme une nécessité par le plus grand nombre pour être en vacances. On peut relever, ces derniers mois, dans nombre de reportages télévisés ou d’articles de journaux, les nombreuses évocations des bienfaits d’une rupture permise par les vacances. Ainsi, Le Monde de l’Éducation du 30 juin dernier titrait : « Vacances « apprenantes » : « Le but initial des colonies de vacances, c’est la rupture avec la famille, l’école, le quartier » ». Le système productif touristique a également intégré cette représentation. C’est un ressort fort de la communication touristique et de la scénarisation des destinations (il faut dé-payser les vacanciers). Presque 40 ans après la 5e semaine de congés payés, 20 ans après la mise en place des dispositifs de réduction du temps de travail (RTT), alors que les écarts s’accroissent entre les « individus géographiquement pluriels » (M. Stock, 2006) et ceux pour lesquels la mobilité reste une épreuve, nous proposons de revisiter le couple rupture – vacances.

QUESTIONNEMENT

On pourra notamment se demander :

– Comment la notion de rupture s’est-elle historiquement imposée dans la sphère des vacances ? Qu’est ce qui est projeté dans cette rupture (à la fois temps pour soi et de bonheur partagé, de répit et d’activités, d’oubli et de mémoire…) ? À quoi s’oppose-t-elle ? Au travail ? Au(x) lieu(x) habité(s) ? Au quotidien de l’univers domestique ? Aux difficultés d’une vie parfois morose ou difficile ?

– Qu’est-ce qui fait rupture symboliquement, économiquement, socialement ? À quelle(s) condition(s) y a-t-il rupture ? Est-ce le lieu ? Est-ce les activités pratiquées ? Est-ce les nouvelles sociabilités tissées ? Et s’il n’y avait que transfert dans un lieu autre des habitudes de vie de celui qui part ? Alors, au final, une telle rupture en est-elle encore une ?

– Dans ses dimensions spatiale et temporelle, la rupture des vacances n’est pas faite pour durer et elle appelle un retour. En ce sens, cette rupture attendue, anticipée, peut rassurer par sa récurrence, sa dimension collective, et elle s’insère dans la continuité d’un temps social et familial qui l’englobe. Mais comment ce rite du départ annuel ou pluri-annuel est-il appréhendé par les personnes qui ont peu l’occasion de partir ?

Une variété de points de vue et d’angles disciplinaires sont attendus pour ce numéro 4 de la revue Partances. Les dimensions évoquées pourront être traitées à travers les dispositifs d’accès au départ en vacances, à travers les aménités spatiales, sociales, économiques, à travers les pratiques des vacanciers (prioritairement des primo-partants ou faibles partants quelle que soit la raison du faible départ, même si, dans une perspective longitudinale, on pourra s’intéresser à des vacanciers plus expérimentés), ou bien dans le cadre de réflexions plus conceptuelles, tout en s’attachant à faire le lien avec la question centrale de la revue (l’accès au départ en vacances).

RÉFÉRENCES CITÉES

GRAVELEAU, Séverin, (2020), « Vacances « apprenantes » : « Le but initial des colonies de vacances, c’est la rupture avec la famille, l’école, le quartier ». Entretien avec Laura Lee Downs, Le Monde de l’Éducation, 30 juin 2020.
MORIN, Edgar, (1962), L’esprit du temps. Essai sur la culture de masse, Paris.
PERRIER, Pierre (2000), Vacances populaires. Images, pratiques et mémoire, Presses Universitaires de Rennes
STOCK, Mathis, (2006), « L’hypothèse de l’habiter poly-topique : pratiquer les lieux géographiques dans les sociétés à individus mobiles. », EspacesTemps.net (En ligne)

 

MODALITÉS DE DÉPÔT DES PROPOSITIONS ET CALENDRIER

Les contributions (texte complet) sont attendues pour le 08 février 2021 et devront présenter clairement :

  • la problématique développée ;
  • la méthodologie mise en œuvre ;
  • le(s) terrain(s) étudiés (dans le cas d’études de terrain).

Elles sont à adresser par mail à : conseil-scientifique-vacances@gmx.fr

Les propositions, rendues anonymes, seront évaluées en double lecture.

Un retour sera fait aux auteurs pour la fin février.
La publication du numéro est prévue pour mai 2021.

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