Loi Montagne

La loi Montagne est, avec la loi Littoral, l’un des grands moments de basculement en France de la conception de l’aménagement du territoire. Elle peut être considérée comme un renversement des postures et des attitudes dans un contexte global marquée par l’institutionnalisation du développement durable avec le rapport Bruntland en 1987. Même si la portée de cette loi est critiquée et limitée, elle illustre parfaitement un changement d’époque.

Un nouveau paradigme après des décennies de préoccupations environnementales

L’avènement de la loi Montagne est l’aboutissement d’une sensibilité ancienne dont le premier élément tangible remonte à la promulgation de la loi pastorale en 1972 qui est complétée par le discours de Vallouise en 1977 (Ill. 1). C’est à partir de ce moment qu’un certain nombre de préceptes vont émerger et produire un nouveau paradigme aménagiste de la montagne et en regard de sa protection: lutte contre la désertification, lutte contre ce qui est alors considéré comme des abus de l’aménagement du tourisme et tout particulièrement le ski, aide à la pluriactivité et protection du patrimoine naturel (Ill. 1).

Ill. 1. Chronologie des législations de protection pour les espaces montagnards (réalisation: Philippe Duhamel, à partir de Violier et al., 2021 , p. 151)

Caractéristiques et enjeux

Votée le 9 janvier 1985 soit un an avant la loi Littoral, la loi Montagne est considérée comme une loi mosaïque avec 30 thèmes d’actions sans qu’aucune d’entre elles ne soit prioritaires. Cependant 25% des articles concernent l’agriculture et un autre quart le tourisme ce qui montre bien les enjeux de cette loi entre développement et protection des activités traditionnelles et par là même des paysages.

Sur la dimension touristique, il s’agit de redonner aux communes la maîtrise des activités touristiques comme la municipalisation des remontées mécaniques et la limitation à trente ans des contrats passés avec les promoteurs. La procédure de création ou d’extension des UTN (Unités touristiques nouvelles) est déconcentrée. Elle est délivrée par le préfet, suite à la demande des communes. Elle va concerner 1/5 du territoire, plus de 6.000 communes.

Par ailleurs, cette loi met en place une nouvelle gouvernance par la création d’une nouvelle instance appelée «massif» dont l’objectif est de favoriser l’interconnaissance d’acteur, jusque-là sans contact et sans échange. Ainsi pourront se rencontrer, échanger voire co-construire des projets, des élus et partenaires socioprofessionnels qui limitaient leur réflexion et intervention aux seules frontières administratives. Initialement, on en comptait huit contre sept aujourd’hui: Alpes, Corse, Jura, Massif Central, Pyrénées, Vosges, La Réunion. Le dispositif est complété par la création du Conseil national de la montagne qui demeure une instance consultative et le Comité de massifs, lieu de concertation et d’orientation pour chaque massif. Depuis 2005, chacun d’entre eux élabore le schéma interrégional d’aménagement et de développement.

Une adaptation aux évolutions du Monde

Enfin, la convention interrégionale de massif engage l’État et les régions concernées sur un programme d’actions prioritaires en lien avec le schéma interrégional de massif. La loi est actualisée en 2016 par la «loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne», appelée loi montagne II.

Elle entérine la spécificité des territoires de montagne et aborde de nouvelles problématiques entre déploiement du numérique, travail saisonnier ou encore réhabilitation de l’immobilier touristique.

Philippe DUHAMEL

Bibliographie

  • Violier Philippe, Duhamel Philippe, Gay Jean-Christophe, Mondou Véronique, 2021, Le tourisme en France 1. Approche globale. Londres, ISTE Editions, coll. «Série Tourisme et systèmes de mobilité n°5», 273p.