Tourisme international

Le tourisme international constitue la partie visible de l’iceberg touristique. Il est pris pour le tout, notamment par les analystes qui ne se réfère qu’aux données produites par l’Organisation Mondiale du Tourisme (OMT).

Comment l’objet est-il appréhendé ?

Le tourisme international correspond selon l’Organisation Mondiale du Tourisme à l’ensemble des voyages induisant un franchissement de frontière par des non-résidents. Ainsi, la nationalité n’est pas la référence, un Allemand résidant à Paris est touriste international lorsqu’il se rend en Allemagne. Souvent pris comme mesure du tourisme dans le Monde, cette donnée est donc partielle puisqu’elle exclut l’ensemble du tourisme pratiqué au sein d’un même État, ou tourisme domestique. Au-delà des critiques visant la production des statistiques à l’échelle mondiale (Stock et al., 2020; Duhamel, 2018) et qui notamment confondent toutes les mobilités, plusieurs points peuvent être soulignés concernant cette dimension dite internationale.

Premièrement, elle est influencée par le pavage des États. Les dimensions très variables des territoires impliquent qu’un franchissement des frontières est plus ou moins aisé pour un habitant résidant au centre de l’espace considéré. Dans la plupart des pays du Monde, les voyageurs effectuant un déplacement relevant du tourisme dit domestique ou intérieur sont plus nombreux que ceux qui ont l’occasion de quitter temporairement le territoire. Font exception, les États qui cumulent une superficie réduite et un niveau de vie élevé, comme la Suisse, mais aussi les micro-États insulaires ancrés dans la mondialisation touristique comme Maurice, les Seychelles ou les Maldives.

Ensuite, les mobilités des non-résidents les conduisent lors de leurs déplacements dans des espaces très fragmentés, caractérisés par un grand nombre d’États, à franchir davantage de frontières que dans des pays aux dimensions continentales comme la Russie, la Chine et d’autres. Si bien que, à nombre égal de voyageurs quittant un État, le nombre d’arrivées est plus important dans un continent très morcelé comme l’Europe que dans un autre où le nombre de pays est réduit comme l’Amérique du Nord qui n’en compte que trois. Il en résulte que dans les publications de l’OMT et dans de nombreux travaux, l’Europe est proclamée comme le continent le plus touristique selon le nombre des arrivées ou des nuitées.

Troisièmement, l’Organisation Mondiale du Tourisme applique un principe de discontinuité. Notamment, les flux touristiques à destination des confetti de France d’Outre-mer (Martinique, Guadeloupe Réunion notamment) sont comptabilisés à part. Chaque territoire éloigné dispose donc de son entrée dans l’Annuaire édité par l’organisme. Mais il y a des exceptions. Ainsi, l’archipel Hawaïen n’apparaît pas et les entrées sont globalisées avec celle des États-Unis. Inversement, Hong-Kong et Macau apparaissent séparément du Mainland. De même, les Canaries ou Madère ne figurent pas dans la table des matières.

Enfin, la mobilité des individus posent également question. Ainsi, qu’en est-il des mobilités touristiques des personnes engagées dans des migrations? Des pays, au Maghreb par exemple, les distinguent dans une catégorie spécifique mise en marge dans les données de l’OMT: les «Nationals residing abroad», soit les MRE, les Marocains résidant à l’étranger (Ill. 1). Ils constituent une part non négligeable des entrées, notamment au Maroc et en Tunisie, tandis que les pratiques des diasporas, qui incluent dans des rythmes variés selon l’ancienneté de la migration, des visites «au bled», expliquent la faiblesse des «arrivées dans les hôtels et hébergements similaires», telles qu’elles sont communiquées à l’OMT.

Ill. 1. Entrées internationales dans les pays du Maghreb en 2018 (source: OMT, réalisation: Philippe Violier)

Trois bassins ou contrainte de la distance ?

L’approche classique du tourisme international a justement pointé une répartition entre trois «bassins mondiaux»: l’ensemble constitué de l’Amérique du Nord, du Centre et des Caraïbes; le bassin méditerranéen, et l’Asie orientale (Cazes, 1989). Mais elle aborde les échanges comme des flux entre des unités équidistantes. Dans la réalité, la distance demeure le concept fondamental de la spatialisation du tourisme à l’échelle du Monde. Ainsi, les déplacements sont-ils plus denses entre États proches (Gay et Violier, 2007) montrant ainsi qu’à cette échelle, le tourisme est une mobilité de proximité. L’illustration 2 permet de le vérifier en comparant les provenances des voyageurs pour la Chine et la France.

Ill. 2. Comparaison entre les entrées touristiques internationales en Chine et en France en 2019 (source: OMT, Yearbook 2021; réalisation: Philippe Violier).

Philippe VIOLIER

Bibliographie

  • Cazes Georges, 1989, Le tourisme international: Mirage ou strategie d’avenir? Paris, Hatier, 195 p.
  • Duhamel Philippe, 2018, Géographie du tourisme et des loisirs – Dynamiques, acteurs, territoires. Paris, Armand Colin, coll. «U», 288 p.
  • Gay Jean-Christophe et Violier Philippe, 2007, «Tous touristes! Le Monde comme espace touristique», dans Retaillé Denis (dir.), Mondialisation. Paris, Nathan, coll. «Nouveaux continents», p. 257-272.
  • Stock Mathis, Coëffé Vincent, Violier Philippe et Duhamel Philippe, 2020 (édition revue, 1re édition 2017), Les enjeux contemporains du tourisme. Une approche géographique. Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 500 p.