Tong
La tong appartient à la famille des sandales et correspond à une facette de l’histoire de la chaussure. Elle incarne aujourd’hui un objet incontournable des vacances.
La sandale est une chaussure qui existe depuis longtemps. Tout le monde s’accorde pour dire que ce sont les Égyptiens qui ont inventé les premières tongs: une semelle de papyrus à laquelle se greffe deux lanières de cuir. L’objectif était de se protéger la voûte plantaire de la chaleur du sable. Conçu pour les travailleurs initialement, elle est devenue une chaussure pour tous jusqu’à Pharaon et sa famille.
Cette invention s’est ensuite diffusée dans l’Empire romain où les Impératrices moulaient leur semelle dans de l’or puis vers l’Asie du Sud (Inde) où elles sont sculptées dans du bois, mais également la Chine et le Japon. La tong s’adapte alors au matériau ambiant et aux cultures: elle est réhaussée et le talon est compensé en paille de riz. Appelé «zori», elle se porte avec la chaussette à un doigt. Au 20e siècle, cela évolue encore et apparaît la «geta» où le talon compensé est remplacé par des patins de bois. Elle restait l’apanage des courtisanes.
Les Européens présents en Asie du Sud-Est vont transférer cette sandale dans leur pays. D’une part, les soldats français «rapatrient» dès les années 1950 sous une forme entièrement plastique et les courants écologiques de années 1970 l’habilleront de cuir. D’autre part et dans le même temps, les Américains présents au Vietnam dénomme alors cette sandale, «thong» c’est-à-dire «lanière».
Dès cette époque, elle devient aussi l’apanage des Cariocas des bidonvilles mais aussi des touristes et c’est au Brésil que se créent le modèle contemporain de la tong: pour s’adapter au climat équatorial, on adopte le plastique imprimé façon grain de riz, en référence aux influences historiques de la sandale.
Deux grandes entreprises de la tong apparaissent au même moment: Sao Paulo Alpargatas et Rider.
Créée en 1962, Sao Paulo Alpargatas dépose le brevet et la marque Havaianas (Hawaii en brésilien) en 1964 ou 1966 selon les sources. Imprimée en bleue et blanche uniquement jusqu’en 1969, une erreur de fabrication les produit en vert cette année-là et le succès est au rendez-vous. Dès lors débute une réflexion sur la forme et le design des tongs et un tournant est pris en 1995 lorsqu’on imprime pour la première fois la semelle d’une fleur hibiscus. Le lien entre Havainas et le Brésil est renforcé avec la Coupe du Monde de 1998 où l’entreprise accole le drapeau brésilien à la marque, en présage d’une victoire. Aujourd’hui l’entreprise s’est imposée et la marque possède des magasins dans 60 pays. Les ventes annuelles oscillent autour de 200-250 millions de paires et depuis sa création, entre deux et 4 milliards de paires de tong se serait écoulées.
Rider est créée en 1971 et ses activités à l’époque consistent à produire des bouteilles de vin en plastique. Les marques Ipanema pour les femmes ou Quicksilver sont venus rejoindre ce duo de tête.
Selon les pays, elle prend une appellation différente. On parle plutôt de «claque» ou «slache» en Belgique ; de «gougoune» au Québec, de «Chipchip» en Égypte ou encore de «Flip-Flop» en Angleterre. Dans la France d’Outre-mer, on parlera plutôt de «claquette» en Nouvelle-Calédonie.
La tong est un bel exemple de la circulation des objets, de leur réappropriation urbain et touristique dans des contextes sociaux et culturels différents, contribuant à leur diffusion mondiale.
Bibliographie
- O’Keeffe Linda, Chaussures. Éditions Könemann, 512 p.