Séjour

Le séjour est l’une des modalités de la présence du touriste dans un lieu, l’autre étant le passage. Le séjour signifie que l’on reste plus d’une nuit dans le lieu. Cette notion ne doit pas être confondue avec le visa «court séjour» Schengen qui permet aux étrangers de résider trois mois maximum dans un pays européen, sauf exception, tandis que le long séjour signifie l’extension du même droit à une année.

Le séjour à géométrie variable

Dès lors, le séjour s’exprime en nuitées et les opérateurs touristiques publics ou privés calculent les durées moyennes de séjour pour connaître les modes de fréquentation de telle destination ou de tel hébergement.

On distingue le court séjour du long séjour. Le premier se limité à une à trois nuitées, tandis que le second n’a pas de limite externe. Cette partition peut sembler arbitraire mais elle permet de cerner les mobilités de fins de semaine qui peuvent caractériser un comportement particulier. En effet, si une partie des individus ne s’y limite pas, une autre les privilégie, et en fait sa seule mobilité du temps libre. Ainsi, dans l’enquête sur les non-partants en vacances réalisée à la demande de l’Agence Nationale pour les Chèques Vacances (2009), 10% parmi cette population déclare préférer les cours-séjours.

La durée moyenne de séjour, dans les faits n’excède que rarement une dizaine de jours, induisant ainsi les logiques qui caractérisent nos pratiques touristiques: une fragmentation des voyages alors que les congés payés, en France, sont de cinq semaines. Cependant, la législation exclut explicitement qu’un salarié les prennent en continu. La cinquième semaine est dissociée, sauf exception, notamment «pour des contraintes géographiques particulières (par exemple, les salariés étrangers ou ceux originaires d’outre-mer) ou de la présence au sein du foyer d’un enfant ou d’un adulte handicapé ou d’une personne âgée en perte d’autonomie» (site Internet du ministère français du Travail, consulté le 29 juin 2022).

La durée des séjours tend à se réduire dans le temps du moins pour la France (Ill. 1). Cette diminution peut être reliée à l’évolution des transports marquée à la fois par une plus grande efficacité des modes de propulsion, par un confort accru des habitacles et par une amélioration des infrastructures. La durée des déplacements d’accès à la destination comme du retour à la résidence ont été réduites, comme la fatigue provoquée est moindre à distance égale.

Ill. 1 Réduction entre 2006 et 2017 de la durée moyenne des séjours des personnes qui résident en France pour leurs voyages personnels (par opposition aux professionnels) vers la France en Europe comme vers l’étranger et la France d’Outre-Mer (source: Mémentos de la DGE)

Séjourner ne signifie pas rester inerte

Pour autant, le séjour n’exclut pas les mobilités que nous qualifions de seconde par rapport au déplacement princeps, ou premier, qui désigne le trajet entre la résidence principale et le lieu de séjour. Ces mobilités secondes peuvent être nommées excursions bien que ce terme soit assez flou, désignant également les courts déplacements à partir du lieu de résidence sans impliquer une nuitée à l’extérieur. Elles impliquent l’aller et le retour dans la journée. Cette réalité souligne que les individus ne sont pas nécessairement sédentaires dès lors qu’ils se sont installés dans l’établissement ou le lieu où ils vont séjourner pour une durée variable.

Cela disqualifie la dichotomie établie par Jean-Didier Urbain entre le  vrai touriste» et le «villégiateur» qu’il exprime dans un entretien avec la journaliste Pascale Krémer (paru le 10 juin 2006) mais qui traverse également une partie de son œuvre entre la figure de Robinson Crusoé et celle de Phileas Fogg. Dans les faits, les individus bougent ou s’installent selon des combinaisons variables selon les périodes, le temps, leurs pratiques… Dans sa thèse, Jérôme Piriou (2012) pointe ainsi des excursions menées jusqu’à Brest par des personnes pourtant installées le long de la Côte d’Émeraude. Et, comme nous l’avons déjà noté, le séjour de découverte dans une métropole induit de fait une grande mobilité, sur de courtes distances certes mais dans tous les sens, un piétinement souvent épuisant.

Séjour et repos font assez bon ménage

Le séjour est plutôt lié au repos et au soin de soi, sans exclure des pratiques de jeu mues par l’engagement physique, notamment dès lors que des spots s’imposent comme des lieux incontournables à fréquenter pour des raisons symboliques. Mais il peut aussi être de découverte, lorsque la pratique s’attarde en un lieu le justifiant selon les représentations des individus. Ainsi, les métropoles touristiques sont présentes dans les catalogues des tour-opérateurs comme dans l’imaginaire collectif sous forme de programmes nécessitant d’y habiter plusieurs jours. Certains voyagistes occidentaux proposent ainsi des combinés Beijing-Shanghai, d’une durée totale d’une semaine impliquant de s’installer alternativement dans chacune des deux cités.

Philippe VIOLIER

Bibliographie

  • ANCV-BVA, 2009, Étude sur les publics non-partants en vacances. ANCV, 21 p., en ligne [pdf].
  • Piriou Jérôme, 2012, Enquête sur la région touristique: une recherche sur les pratiques spatiales de dimension régionale des acteurs du tourisme. Thèse de Géographie, Université d’Angers, 2 vol., 775 p.
  • «Entretien avec l’anthropologue Jean-Didier Urbain, 1936-2006: il était une fois les vacances», Propos recueillis par Pascale Krémer, Le Monde du 29 juin 2006.